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Petit cocktail d'actualités juridiques par une passionnée du droit

Alinéation d'un chemin rural - point de départ du délai de recours

Alinéation d'un chemin rural - point de départ du délai de recours

Appartenant au domaine privé des communes, les chemins ruraux sont aliénables, à l'inverse des autres voies publiques.

Pour rappel, avant d'adopter une décision d'aliénation de parcelles supportant un chemin rural après sa désaffectation ou de parcelles supportant des voies du domaine public routier après déclassement, les propriétaires riverains doivent être mis en demeure d'acquérir ces parcelles. Le délai de recours contentieux contre une telle décision d'alinéation ne peut courir qu'à compter de la date à laquelle la décision leur a été notifiée, peu importe que cette décision ait été publiée ou affichée par ailleurs.

Cette obligation de notification vaut quelle que soit la nature de l'aliénation : vente, cession gratuite, échange.

Dans l'affaire à juger, la propriétaire riveraine du chemin qui avait saisi le Tribunal administratif de Strasbourg d'un recours contre la délibération du Conseil municipal de la Commune de Luttange (Moselle), s'est vue opposer la tardiveté de sa requête.

La question s'est alors posée pour le Conseil d'Etat de savoir si le principe de sécurité juridique n'implique pas que la remise en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps fasse obstacle à ce que puisse être indéfiniment contestée une décision qui a été notifiée ou dont le destinataire a eu connaissance. (application de la jurisprudence Danthony) 

Le Conseil d'Etat statue au fond et retient que c'est à bon droit que la Cour administrative d'appel a retenu que la saisine ne pouvait être tardive dès lors que cette riveraine n'avait pas reçu ladite notification et que les parties adverses n'apportaient aucun élément de nature à établir la date à laquelle la riveraine aurait eu connaissance de la délibération.

Sur la légalité de la délibération, le Conseil d'Etat confirme la légalité de l'arrêt de la Cour qui retient que l'absence de désaffectation et de décision expresse de déclassement faisait obstacle à ce que le Conseil municipal puisse légalement approuver le transfert de propriété de la parcelle supportant une voie communale. Le Conseil d'Etat rejette donc le pourvoi et confirme l'annulation de la délibération du Conseil municipal.

Il faut également garder en mémoire que la jurisprudence considère que l'illégalité d'une délibération décidant l'aliénation d'un chemin rural, laquelle serait pourtant devenue définitive, peut être invoquée par exception à l'occasion d'un recours contestant la validité d'une délibération autorisant l'alinéation (la vente dans le cas jugé par la CAA Marseille, 9 avril 2021, n° 19MA03786).

La plus grande vigilance quant au respect de l'entière procédure permettant l'aliénation d'un chemin rural, est de mise pour toute commune.

 

Conseil d'Etat, 5 juillet 2022, M. C et Commune de Luttange, n° 459683

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